samedi 28 avril 2012

HANG ON BABY, HANG ON...*



http://youtu.be/ykKNC6NjgMc
(à écouter en lisant)


* Tiens bon, (chérie/bébé/ma puce/...), tiens bon

Je sors d'une petite nuit, cad insomnie depuis 3 heures du matin, ce qui n'a rien d'étonnant étant donné le vendredi pourri que j'ai vécu.
Je suis fatiguée et pas très aidée par le temps gris et blanc. Mon coeur est lourd, lourd...
Je sais que tout ça va finir par s'arranger. Que je vais retrouver du travail. Que je vais faire refleurir ce qui a été cruellement piétiné.Que le temps va arranger les choses...Cette même expression a été employée par une personne que je connais et qui a subit une tentative de meurtre. Elle attend que le temps passe et efface peu à peu son angoisse, sa douleur. Je dis toujours qu'il n'y a rien de plus con que de faire un concours de souffrance, mais là je lui laisse la première place, je lui souhaite toute l'attention du monde, toute l'amitié qu'il est possible de donner !

Je suis partagée entre une certaine douceur, peut-être de la lassitude, et une envie de pleurer. Une envie à bas bruit, qui se fait discrète et qui éclate sans prévenir...Il suffit que je pense à la réaction de M-G (qui est maintenant une ex-collègue) pour que les larmes me viennent. Je suis certaine qu'elle a pleuré quand on lui a annoncé la nouvelle...car je n'ai pas pu lui dire au revoir. Je n'en ai pas eu le temps. D'autres personnes ont pleuré avec sincérité en me serrant dans leurs bras, en me souhaitant "une belle renaissance". D'autre ont avancé que c'était "émotionnellement très dur", croyez-le ou non mais je les crois sincères...mais je ne me fais pas de souci pour eux, cela leur passera vite !
Je suis donc dans un état où j'ai besoin de réconfort. J'en ai reçu de mes amours. Mais ce n'est pas leur affection qui fait défault mais bien l'estime de soi qui est en berne, l'espoir qui est hésitant.
Alors dans ces cas-là, je fais appel au "souvenir émotionnel réparateur". Je vais chercher une petite madeleine de Proust qui me remet dans une situation antérieure relativement indentique, où j'ai dû surmonter un desespoir inattendu et quand j'ai besoin de recapitaliser sur moi-même. Cette chanson "Save all your kisses for me" en est le principal actionnaire. J'essaie de ne pas y faire appel trop souvent pour ne pas le déforcer, mais là, j'en ai grand besoin !
Dans les grandes lignes : un oral de fin d'étude s'était mal passé car malgré toute ma bonne volonté, ma préparation et même ma passion pour la matière, j'avais échoué (ça arrive). Ce qui m'avait plongée dans un état de larmes sans discontinuer. Parce que je ne m'y attendais pas, parce que jamais je n'aurai pensé que cela puisse m'arriver...comment une situation si positive au départ avait-elle pu se changer en un océan de tristesse et d'incompréhension ? (cela vous évoque un peu ma situation actuelle ?). Aujourd'hui, je ne peux pas dire que cela m'a totalement surprise. Pour tout vous dire quand on voit une personne se conduire avec une totale méconnaissance de la nature humaine et un profond irrespect des autres, on s'attend à ce que cela vous tombe aussi dessus. Mais pas si tôt. Mais pas comme ça.
Ou alors, j'ai été trop présomptueuse, trop imbue de moi-même. Pire, j'ai cru un an plus tôt aux "il n'a rien de négatif, aucune remarque, aucun reproche à vous faire", " vous vous êtes habituée à une situation, à une législation totalement nouvelle". Oui, vraiment quel manque d'humilité de ma part...

C'est vrai qu'une situation n'est positive ou négative qu'à un moment T, elle fluctue, elle évolue, c'est dans la continuité des choses. Mais, quand on peut mettre le mot "fin" (la fin d'une historie d'amour, d'un contrat de travail, etc.), on peut de fait évaluer et donner une connotation. Et si la fin est triste, il est dans la logique humaine de lui donner une note globalement négative.

Je vous ai laissés en plan, avec moi, étudiante, en train de verser des torrents de larmes. Je m'en excuse et vous sors de cette situation de drame : je ne voulais plus continuer, je ne voulais plus rien faire..seuls les mots de ma gentille colocataire m'avaient tiré de ma rage et de mon chagrin, "essaie juste ton oral de philo de demain, tu verras bien...". Le lendemain, l'oral s'est correctement déroulé et le prof transmettait une incroyable zénitude (ou l'inverse) et je suis revenue à mon "Kot" en dansant presque, c'était une comédie musicale dans ma tête avec les passants qui faisaient une chorégraphie pour moi. En rentrant, j'ai allumé la radio et la prenière chanson que j'ai entendue c'était "Save your Kisses for me" par Brotherhood in man...et si vous écoutez bien, ce qui revient souvent et qui a du sens pour moi c'est "Hang on, baby, hang on..."

ps : Tout en réfléchissant, j'ai lu un article vraiment intéressant sur yahoo "Ce qui fait un bon ou un mauvais patron", je le partage avec vous...http://fr.finance.yahoo.com/actualites/les-huit-secrets-des-patrons-hors-du-commun.html

vendredi 13 avril 2012

GOD SAVE THE COOK (suite et peut-être pas fin...)

L’heure est grave, je suis dans une terrible frustration. D’où ma nécessité de reprendre le tout premier message de ce blog et de vous faire partager mes élucubrations :

En mai prochain sort en France le tout nouveau Livre de Jamie (voir plus haut). Il est déjà sorti en septembre dernier en Angleterre (en VO), et vous vous doutez bien que ce n’est qu’une volonté vacillante d’être un peu raisonnable, et aussi le manque de finances m’empêchant (temporairement) d’aller en Angleterre qui font je me vois contrainte de ronger mon frein …

En parallèle, Nigella « écrit comme une folle », « séquestrée dans une cellule sans fenêtre » (ces « witters » sont issus de son site internet) pour finir dans les temps un nouveau livre de recettes, entièrement consacrée à l’Italie. Cela promet d’être un très beau livre, il s’appellera : Nigellissima.
Il y a quelques années, Jamie l’avait fait également. Mais, comme ils adaptent les recettes italiennes à un public plus large (et principalement anglo-saxon), la touche anglaise est omniprésente. Et grâce à leur profond respect pour cette cuisine et pour la cuisine en général, c’est fait de façon intelligente.

J'ai bien trouvé quelques trucs pour patienter :

J’ai « feuilleté » de façon électronique les premières pages du livre et j’ai hâte, si vous saviez comme j’ai hâte ! Des recettes que j’ai déjà envie d’essayer, l’ enthousiasme communicatif de Jamie et son entourage « créatif », toujours si inventif (photos, mises en pages, commentaires)…ça promet d’être un "vrai kif". Je me vois déjà la tête adossée aux coussins de mon lit à lire religieusement…

Je suis aussi depuis plusieurs semaines les différentes étapes de la rédaction du livre que Nigella met sur son site internet. Ce n’est pas fixe, elle poste quand elle en ressent le besoin (comme je la comprends). Cet aspect imprévu apporte du piquant puisqu’il crée de l’attente (enfin, chez moi...Et chez ses fans aussi, je suppose). Il y a peu, je lisais avec délectation ses tribulations à propos d’un achat massif de légumes (« witter du 10 mars), pour illustrer son prochain livre de recettes. Ce qui était, au départ, une idée pertinente : l’Italie est reine pour magnifier et marier les plus simples légumes, a pris les proportions d’un étalage de maraicher et a été transformé, fort heureusement pour ses lecteurs, en idées de recettes. (Nécessité est mère de créativité c’est bien connu). Bref, c’était, comme toujours, très drôle !

De moi côté, j’aime écrire et gourmande comme je suis, la cuisine est une thématique quasi-inépuisable pour moi. Mais, je ne tiens pas à écrire des livres de cuisine. D’abord parce que certaines personnes font ça bien mieux que moi, et puis cela me semblerait réducteur de « tout ramener à la bouffe », même quand celle-ci est bonne.

(Dans l’absolu, je préférerais écrire sur les grands et petits bonheurs, sur tout ce qui peut vous mettre de belle humeur, ou par temps chanceux l’âme en extase ou en paix, c’est une idée qui reste en suspend…).

En fait, je suis comme Nigella, je préfère manger plutôt que de suivre des recettes. Certes, cuisiner me détend énormément et la recherche de nouvelles saveurs, associations, et idées est, en ce qui me concerne, un formidable stimulant pour bien terminer une journée. En revanche, je ne me sens pas la patience et encore moins la capacité à prodiguer des savoirs-faires. De loin en loin, j’aime proposer des conseils directement issus de l’expérience, ce qui induit qu’ils ne doivent pas être suivis, juste adoptés si vous les aimez ou tout le moins si vous vous sentez en confiance avec eux.

J’ai, vous l’avez certainement compris, beaucoup de livres de mes deux auteurs chéris. Je pousse même le vice à acheter et à me faire offrir certains de leurs livres en français ET en version originale. (Tous ceux de Jamie ont été traduits, pour Nigella seulement deux). Par snobisme, peut-être, mais aussi parce que cela répond à des besoins différents chez moi : quand je veux que ce soit fluide, je prends celui en français, quand je veux « les entendre », je m’installe dans un fauteuil (ou le soir dans mon lit) avec la version originale. En fait, j’adapte aux livres, ce que tout un chacun fait face à un film ou une série : quand vous êtes fatigués les sous-titres sont au dessus de vos forces, quand vous êtes passionnés, vous voulez tout, la voix, les mots, les intonations. (Sans compter que certaines expressions ou tournures ne peuvent être rendues dans toute leur saveur).

Le mois dernier, j’ai participé à une formation sur la communication, l’expression orale et il fallait parler d’une de ses passions : j’ai pris comme thématique ce blog et en particulier mon tout premier message traitant de mon attirance pour la cuisine anglaise. Bien-sûr cela a étonné.

Alors pourquoi ?

Je crois que cela a tout simplement quelque chose de…rassurant, de réconfortant…de stable même pourrais-je dire. Ce qui, je le conçois, peut paraitre en totale contradiction avec une expérience traumatisante à laquelle j’ai dû faire face lors d’une journée passée à Canterbury : un « Kidney @ beef pie » dans lequel se trouvent des morceaux de bœuf gélatineux, des petits pois douteux et des grains de maïs perdus là…en plein milieu de la sauce, …c’est une expérience à vivre, mais juste une fois. Pourtant, mon indulgence pour cette cuisine était déjà bien présente puisque je me souviens avoir étonnée (« horrifiée » serait plus juste) certaines personnes en avalant un copieux breakfast avec lard, œufs, saucisses et tutti quanti.

Je vais faire une légère digression : hier soir, nous étions, mon chéri et moi, attablés devant des Penne  Veneziano  et une bouteille de Lambrusco (doux). Un repas simple et merveilleux tels que je les aime. Ceci, d’autant plus que c’est un restaurant où l’accueil et le service sont chaleureux. Pas simplement gentils, mais aussi par leur volonté de proposer autre chose que les « restaurants à touristes » que l’on trouve, malheureusement, un peu partout en France comme en Italie. Pendant que le serveur parlait je me suis vue en plein été dans une trattoria puis au bord d’un lac sous des citronniers. Les explications des recettes sur la carte et sa passion m’ont aussi réchauffée de l’intérieur. Ce qui prouve, et là je reviens doucement à mon propos, que la vraie cuisine d’un pays ne se résume pas aux restaurants (qui parfois étaient devenus des cantines) mais bien à ceux qui la font avec cœur et souvenir des traditions. Je ne parle pas de « traditionnalisme » figé mais bien de revenir aux sources. Concevoir un peu les fondamentaux d’une cuisine comme une mamie pleine de sagesse qui vous répond avec un sourire quand on la taquine.

D’ailleurs, en dépit de mon enthousiasme pour la cuisine anglaise, croyez-le ou on…mais, je n’ai pas encore eu l’occasion de goûter à une vraie cuisine traditionnelle anglaise. Je pourrais aller dans certains restaurants de Londres qui sont des valeurs sûres, mais demandent un certain budget. Ou alors, caresser le rêve d’un pub, un jour dans la campagne galloise ou dans le Yorkshire (ou le Kent) où on me servirait un « steack and Kideney pie » vrai de vrai…


 

Ps : le temps que je finisse d’écrire cette chronique, j’ai appris que Nigella, avait pu « rendre à temps sa copie » et donc était sortie de sa « prison » pour se mettre derrière un appareil photo et constater qu’un plat de…carottes (de courges ?) serait du meilleur effet dans le futur livre.

mercredi 11 avril 2012

UNE MAIN PLEINE DE GRENADES OU UNE MAIN PLEINE DE PIECES



Autant commencer tout de suite par vous rassurer : je n’ai pas changé de voie professionnelle pour une carrière dans l’armée, ni décidé de me faire vengeresse (implacable et énervée) face à des comportements injustes à mon encontre. Non. Ce titre fait simplement référence à un de mes précédents messages (voir « La quête désespérée de la grenade et…)

Pourtant, je vais aborder la question de la justice universelle, à mon niveau, c'est-à-dire à partir de petites choses qui  ensuite se transforment en ébauche de réflexion. Je vous laisserai en combler vous-même les possibles lacunes.

Il serait absurde de dire que la tension et le suspens étaient à leur apogée, mais, je n’attendrai pas la chute de cet écrit pour vous dévoiler qu’ENFIN, j’ai trouvé des grenades. Plus par hasard que par obstination car, pour tout vous dire, je n’étais pas venue en chercher. J’avais un plan de course bien établi, et pour cause, je déteste viscéralement les mégas-hyper-super-marchés, enfin tout ce qui dépasse la taille d’une superette, car j’y perds incroyablement vite patience et tout débordement me parait une perte de temps ;  et, pour appuyer encore mon propos, j’avais, littéralement accrochée à mes basques, une petite fille de 5 ans (la mienne). Au départ, j’avais simplement jeté un coup d’œil, pas bien loin des salades, mais quand on a des obsessions, on a des obsessions. L’entêtement a pris l’avantage sur la raison : j’ai saisi une grenade puis deux (je vais faire des réserves…enfin, j’essaie de me convaincre du bienfait de ce raisonnement). Bien entendu, tout cela va m’amener à des achats non planifiés et hypothétiquement perdre du temps dans un grand magasin. (En rentrant à la maison, je ne me souvenais même plus pour quelle recette ces grenades m’avaient parues indispensables, mais versatile comme je suis, j’en ai vite trouvé une, plus attrayante encore)
A la caisse, j’alternais les courses sur le tapis roulant et les coups d’œil à ma fille avec des « Mon cœur, ne t’éloigne pas ! »  Dès qu’elle faisait mine de lâcher (littéralement) ma veste en cuir, quand une odeur pestilentielle…oui …c’est le terme… s’est imposée à moi. Je n’ai pas immédiatement compris d’où elle venait. Pour être honnête, je trouve que dans ce genre de lieu on ne pense plus, si ce n’est trouver la sortie la plus proche. C’est en voyant les gestes maladroits et la main pleine de petites pièces du monsieur derrière moi que j’ai su que cette odeur, cette main et ces gestes étaient liés.  Le fait qu’il avait acheté bien peu de chose, dont une vague bouteille de vin, sa tenue et son  regard dans le vague auraient dû me mettre sur la voie. Pourtant, non. Est-ce que cela est devenu suffisamment courant pour que cela ne m’étonne plus ?
Le temps que je paie, que je finisse d’empaqueter mes affaires et que je répète pour la 22ème fois à ma fille de « ne pas s’éloigner », il était devenu évident que ce qu’il avait dans la main n’allait pas suffire à payer…quoi ? Presque rien…Une impulsion m’a fait chercher mon porte-monnaie et dans ma tête résonnait déjà la question « combien est-ce qu’il manque ? »… Et à la place je me suis souvenue que j’avais oublié de faire valider mon ticket de parking. Alors, je l’ai tendu à la caissière qui paraissait impatiente que le monsieur parte, j’ai pris ma fille par la main et je suis partie.

Je veux dissiper un possible malentendu : je ne porte aucun jugement de valeurs sur le comportement ou l’attitude de la caissière.  Je ne fais pas son boulot, je ne l’ai jamais fait alors je ne peux pas donner mon avis, il serait bien mal placé.  

Sur le trajet du retour, je me suis interrogée sur les raisons qui avaient avorté mon geste. Vous répondrez que je suis tout simplement égoïste ou que l’on ne peut pas donner tout le temps et à tout le monde. Si on prend cela au pied de la lettre, ce n’est évidemment pas possible. La première hypothèse n’est pas juste non plus si j’en crois les personnes qui m’apprécient et ma propension à donner une pièce ou deux à une main tendue, surtout quand l’autre tient un chat ou un chien (ce qui  me met parfois dans des situations embarrassantes quand, par exemple, je n’ai même plus de quoi payer 10 minutes de parking). Je ne veux pas non plus « trop donner » car cela me ramène au comportement de quelqu’un qui me faisait honte. Je l’ai vu vider des porte-monnaie face à des personnes incapables de le reconnaitre 5 minutes après.  Je sais que mon esprit a été traversé par le fait que j’allais paraitre ridicule aux yeux de la caissière…pourtant, la générosité est un comportement que je valorise.  Vous me direz peut-être que j’ai pensé beaucoup de choses pour quelqu’un qui était « incapable de penser ». Mais, cette idée a été furtive,  et elle a certainement suffit à déterminer mon comportement.
Je ne cherche pas ici à démarrer une psychanalyse ou une analyse approfondie. En fait, le temps que tout cela tourne et retourne dans ma tête, je suis arrivée à la simple conclusion que je voulais comprendre ma décision pour pouvoir  au mieux l’adapter plus tard. Les personne qui ne donnent jamais rien ou donnent tout ce qu’elles ont n’existent pas. Mais alors, où placer le curseur pour être en paix avec soi-même ?  Est-ce qu’on donne par pure générosité ou simplement pour se donner bonne conscience ? Vous savez comme moi que ce type de réponse n’est pas satisfaisant…  Nos actes sont fortement influencés voire déterminés par les situations  dans lesquelles nous nous trouvons. Nous avons tous des valeurs dont les origines sont multiples. Le fait de donner peut avoir  une connotation totalement positive (c’est un principe commun aux religions) ou totalement négative.
Est-ce qu’il y a une vérité absolue ?  Mon sentiment est qu’il n’y a de vérité que pour soi. Y mettre un principe universel est une illusion.

Puis,  un signal sur ma voiture m’indiquant qu’une porte était mal fermée a obnubilé mon esprit. Et ceci bien plus longtemps qu’il me m’en avait fallu pour me poser ces deux ou trois questions.
 

Plus tard, en rangeant mes courses, j’ai repensé au prix de mes grenades. De chacune. Et des deux ensembles. Et je me suis de nouveau posé ces mêmes questions…moi, qui avait cette chance d’avoir la main pleine de grenades.


dimanche 1 avril 2012

REVER SA VIE EN PANTALON ROUGE ET PULL ROSE



Le week-end dernier le beau temps m’a amenée dans le jardin et allez savoir pourquoi (par association d’idées sans doute), m’est revenu en mémoire un frais matin de janvier d’il y a une quinzaine d’année. Ou plus exactement un matin idéalisé.

Vous devez savoir que j’ai longtemps acheté des vêtements parce que je me voyais avec dans un futur, un moment rêvé et planifié. En l'occurence, j'avais acheté un pull rose, mousseux (et coûteux)chez Laura Ashley, à porter avec mon mythique pantalon rouge, parce que je voulais être habillée comme ça au matin du 1er janvier chez des amis d'amis avec qui nous fêtions toujours le réveillon. Je m’étais « vue » dans ces vêtements, allongée sur leur canapé, dans un grand moment de quiétude en train de caresser un des chats et d’être là tous ensemble comme cela arrivait souvent. Je ne sais plus si j’ai été vêtue comme je l’avais planifié, je sais en revanche que cela ne s’est jamais vraiment déroulé. Cette matinée n’a vécue que dans mon imagination. Nous avions passé beaucoup de temps ensemble, préparé des repas, des anniversaires, des nouvels ans, etc. mais j'ai découvert à mes dépends que les "amis de mes amis [ne] sont [pas toujours] des amis". J'avais organisé un w-e prés de la mer et le couple d'amis qui faisait le lien s'était désisté car l'un d'eux était malade. J'avais appelé pour connaitre l'heure d'arrivée des autres et celle qu'on appelait "Za" m'avait répondu sans le moindre tact "Si Tho et Ma ne sont pas là, on n'a pas de raison de venir". Cette simple phrase, en dehors du fait qu’elle m’a fait mal, m’a immédiatement éclairée sur la nature et le manque de profondeur de notre amitié.
Il avait suffit de quelques mots pour que je ne passe plus de temps en leur compagnie.

Que sont devenues ces amitiés, qui sont finalement de passage ? Quelle utilité ont-elles ? Servent-elles à nous construire ou ne sont-elles là que pour combler un vide ? J'ai un jour posé ces questions à quelqu'un dont j'avais foi ...ce quelqu'un m'a dit qu'on n'avait partagé que des moments de plaisir, pas de moments difficiles...
Je suis plutôt d'accord mais...est-ce que cela signifie que le plaisir partagé ensemble n'a pas de valeur ? Pourtant, ce dont je me souviens le plus volontiers c'est le simple plaisir d'être avec certaines personnes, de m'assoir avec elles autour d'une table de restaurant et de partager nos vies et des cheese-cakes ! Ces amitiés se nourrissent du manque car nous nous voyons peu ou plus exactement "jamais assez". A chaque fin de journée nous avons cette même phrase "c'est encore passé trop vite".
De plus, à combien de personnes avez-vous confié vos doutes, vos chagrins ou à l'inverse que vous avez écoutées, consolées parfois conseillées, sans qu'une relation sincère se crée pour autant ?

Je me suis vue à de nombreuses reprises dans des vêtements précis pour accompagner les situations que je voulais vivre. Le plus souvent, j'ai acheté ces vêtements, comme si ce simple acte allait les faire naitre. Bien entendu, ces moments ne sont jamais vraiment venus. On ne peut pas rêver sa vie à l’avance.

Pourtant j’ai dans ma garde robe des vêtements symboles de réussite , de progrés…de bonheur (le fameux pantalon rouge), mais surtout : le tailleur pantalon après l’examen de méthodologie (c'est une matière en psychologie expérimentale, maintenant que vous savez ça, vous pouvez tout à fait l'oublier).
Laissez-moi vous donner cet exemple : en licence, je devais passer un oral détesté des étudiants car la matière était rebutante et les notes souvent basses (avec un fort coefficient). Je pourrais en faire une chronique entière (bel exemple de résilience*, à mon humble niveau) mais je vais, pour une fois, en donner l'essentiel : je n'avais pas droit à l'échec, j'ai passé cet oral dans les pires conditions possibles et je n'avais de fait aucune mais alors aucune confiance en moi (il faut dire que j'ai très sérieusement pensé à me jetter par la fenêtre la veille de cet examen) et, en définitive, j'ai atteint la meilleure note de la promo (j'en suis encore très fière, pas orgueilleuse je le promets, mais je me répette à dessein : c'est un bel exemple de "résilience"). Une copine d'enfance m'avait accompagnée durant cette épreuve. En sortant je l'avais emmenée vers le Comptoir des Cotonniers le plus proche et j'avais fêté ma victoire en achetant un tailleur pantalon. Un ou deux ans plus tard, nous nous n'avons plus été amies. Tout comme je ne suis plus amie avec celle qui était la marraine de ma fille. J'ai analysé pourquoi je ne pouvais plus envisager que cette dernière fasse partie de ma vie. Mais longtemps, je me suis perdue à chercher pourquoi les petites filles qui se cachaient dans des placards pour passer plus de temps ensemble étaient devenues des adultes que plus rien ne relie...et puis une petite phrase prononcée par ma copine d'enfance ce fameux jour m'est revenu en mémoire : je la revois lisant l'étiquette avec le prix du tailleur et me disant sur un ton en total désaccord avec ma joie exubérante du moment : "si tu peux te le permettre...".
L'autre ancienne amie, celle avec qui j'ai rompu les ponts définitivement avait commencé à se rendre insupportable avec ses fréquentes remarques sur ma propension à dépenser de l'argent pour mes fringues et surtout celles de ma fille...Les amies qui me connaissent bien savent que c'est davantage chez moi un excés d'optimisme (parfois une certaine insconscience) qu'un salaire illimité qui me pousse à ces choix...suivis quand il le faut de périodes de restriction totale.
"Si tu peux le permettre..." m’éclaire de nouveau sur la nature de notre relation et le trait commun entre ces deux amitiés : la jalousie.
(Je viens d'une famille qui a un rapport sain avec l'argent : j'ai beaucoup d'admiration pour les personnes généreuses mais aussi économes, aucune pour celles qui ont la critique ou la radinerie enchainée dans le corps...).

Un ultime exemple le plus fort dans ma mémoire : Le jour où j'ai terminé ce que je considère comme un des meilleurs jobs, je me suis, de nouveau, "vue" dans des vêtements particuliers (ma veste noire en cuir et une longue écharpe pervenche) conduisant ma voiture de retour du travail, avec l'espoir d'intégrer de nouveau et pour un temps très très long ce super job. Cela fait plus de 10 ans que j'ai cet espoir, cette attente tout au fond de moi...depuis quelques semaines des fenêtres ce sont ouvertes...je ne compte pas les laisser se refermer...et le plus compliqué ce n'est évidemment pas d'enfiler ma veste et mon écharpe...Mais, si j'ai l'opportunité d'y revenir, je me ferais un vrai fun à porter l'écharpe et la veste en cuir...



* que d'éventuels puristes m'excusent, il ne s'agit pas strictement de résilience qui est un concept et un processus plus complexe. J'aurais pu parler de "coping" (To Cope : s'en sortir), mais "résilience" est une terme plus connu et qui a transmet, aprés vulgarisation, l'idée de rebondir à partir d'un échec.